Les anciens
15 janvier 2006

Les anciens

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Passage: 1 Timothée 5:17-25
Topics:

Introduction

Dans une Église que je connais, on trouve un chef d'entreprise dans le conseil, et le pasteur est payé moins que le SMIC, soi-disant pour un temps partiel. Dans une autre, deux des anciens ont forcé le pasteur à démissionner avant d'être à leur tour démissionnés par l'assemblée des membres. Dans une autre, le pasteur est parti avec sa secrétaire, laissant sa femme sur le carreau.

Quand il y a des problèmes avec les responsables d'une Église, c'est grave. Nous savons que sur terre, il y aura toujours des problèmes, des déceptions, des trahisons. Pensez à Judas. Le meilleur des bergers n'a pas empêché ses plus proches collaborateurs de s'enfuir. Son second l'a renié. Son trésorier piquait dans la caisse. Au plus fort de la tempête seules quelques femmes, l'apôtre Jean et un riche inconnu lui sont restés fidèles. Les crises graves font partie de la vie. Statistiquement parlant, on ne les évitera pas.

Comment les gérer ? C'est cela qui est important. Et, plus important encore, comment choisir des responsables dignes de confiance ? Voilà le sujet de la prochaine section de l'épître de Paul à Timothée que nous allons étudier ensemble. Et cela tombe bien, puis qu'à la fin du mois de février nous allons voter pour nos responsables, un ancien et des diacres.

Lecture : 1 Timothée 5.17-25

Contexte

L'apôtre Paul venait de parler de la façon d'honorer les veuves, celles qui le sont réellement. Il enchaîne avec la façon d'honorer les anciens, c'est à dire les responsables d'Église. Et puisqu'il y a des problèmes avec certains responsables d'Église à Ephèse – ils enseignent n'importe quoi, ils sont attirés par l'argent – puisqu'il y a des problèmes avec les anciens, il donne des indications sur la façon de régler les problèmes et de les prévenir.

Le double honneur

Si nous prenons les traductions plus anciennes et plus littérales, nous avons au verset 17 à peu près ceci : que certains anciens doivent être jugés dignes d'un double honneur. Il faut plus de considération pour ceux qui dirigent bien. Pas seulement pour ceux qui président bien, qui présiderait bien les cultes par exemple, mais pour ceux qui sont de bons leaders. C'est là le sens du mot. Avoir plus de respect pour ceux qui dirigent bien, c'est normal.

Mais au verset 18 l'apôtre justifie ce double honneur en parlant du bœuf qui mange le grain quand il travaille ou de l'ouvrier qui mérite son salaire. Le double honneur a donc un aspect matériel. Et c'est pour cela que la Bible du Semeur traduit : Les responsables qui dirigent bien l'Église méritent des honoraires doubles. Honorer les veuves, c'était leur apporter un soutien matériel. Honorer certains responsables, c'est veiller à leur salaire.

La suite de l'épître montrera que nous ne sommes pas du tout dans le cadre de ces Églises qui sont de véritables usines à fric. Mais nous ne sommes pas non plus dans le cadre des Églises qui pensent que le prêtre ou le pasteur doit être pauvre comme Job. Si un responsable choisit la pauvreté, c'est son affaire. Mais l'affaire de l'Église, c'est de veiller à ce qu'il soit correctement rémunéré.

Rassurez-vous, je ne parle pas ici pour moi. Je n'ai pas du tout à me plaindre. Je parle de ce que dit la Bible. Et je parle pour vous quand vous serez dans d'autres Églises. Je parle pour nous tous quand nous envoyons des gens enseigner la Bible au loin, des missionnaires dont nous devons assurer le soutien. En allant un peu plus loin que ce texte, je parle même des musiciens professionnels chrétiens : L'ouvrier mérite son salaire. C'est Jésus qui l'a dit, et l'apôtre le cite.

Faut-il rémunérer tous les services dans l'Église ? Manifestement pas. L'apôtre met l'accent sur ceux qui dirigent bien et qui se dévouent au ministère de la prédication et de l'enseignement. Tous les anciens doivent être aptes à enseigner et à discerner la vérité et l'erreur. Mais certains ont un ministère particulier, qui doit être pris en charge par l'Église. L'apôtre parle dans ce cas d'un labeur, que la Bible du Semeur traduit : un ministère astreignant.

Il est certes exigeant, mais le travail du pasteur n'est pas forcément plus astreignant que de se lever à cinq heures du matin pour faire le ménage à la clinique de Tournan, ou de devoir atteindre des objectifs de ventes chaque mois plus élevés. Fred a dit lundi soir qu'il ne voudrait pas être à ma place. Mais, Fred, je suis heureux comme un chauffeur qui aime son camion et qui aime la grande route ; je suis heureux comme un imprimeur qui est heureux de faire du beau travail. Je suis heureux d'être à la place que Dieu veut pour moi et dans une Église formidable. Être pasteur, si Dieu vous y appelle, si Dieu y appelle votre enfant, c'est bien. Il y a des responsabilités. Elles peuvent être lourdes. Mais dans une Église comme Ozoir, on peut les porter avec joie.

Ceux qui pèchent

L'un des fardeaux des responsables, ce sont les attaques qu'ils peuvent subir. Si vous faites quelque chose, vous serez forcément critiqué. Si vous voulez vivre heureux, vous n'avez qu'une solution, c'est de vivre caché. Les responsables d'Église seront forcément critiqués. Souvent de petites choses sans gravité, et contradictoires : ils sont trop durs, ou trop mous, ou les deux à la fois. Parfois on les accusera à tort ou à raison de choses graves : des indélicatesses financières ou sexuelles, une attitude tyrannique à la maison, une fausse doctrine…

Timothée est certainement devant un cas réel : il y a plusieurs personnes qui sèment le trouble dans l'Église. La lettre dénonce d'une part de graves déviations par rapport à l'enseignement, d'autre part la soif de l'argent. Ca ne peut pas continuer comme ça. Il va y avoir une confrontation.

La règle que Paul édicte ici, c'est la même que l'on trouve dans la bouche de Jésus en Matthieu 18, elle vaut pour tous les membres d'Église. Il faut deux ou trois témoins. Soit des témoins directs de la faute, soit des gens qui ont écouté les parties en présence et qui ont tiré les premières conclusions. Il ne faut pas écouter des bruits qui courent. Il ne faut pas prêter l'oreille aux récriminations de personnes instables ou mal-intentionnées. Mais si l'accusation est à la fois grave et fondée, Paul dit : Reprends-les, reprends les anciens pris en faute. Non pas entre quatre yeux, mais publiquement, devant tous. C'est pareil pour le chrétien lambda en Matthieu 18.

Parfois les journaux mettent en évidence des scandales où une Église a essayé de cacher quelque chose, de protéger ses responsables en même temps que sa propre réputation. Certains milieux cultivent le secret. Mais la Bible, sur ce thème, demande la transparence, au moins au niveau des membres d'une Église locale. C'est ainsi que les autres seront protégés contre le même type de chute : ils en éprouveront la crainte.

Mais tout cela doit se faire calmement, avec des témoins, et sans parti pris ni favoritisme. On ne tranche jamais sans avoir écouté les deux côtés. On ne désigne pas d'avance les coupables. On ne favorise personne.

Le choix des responsables

Dans la crise qui se vit à Ephèse, il n'est pas facile pour Timothée de faire preuve de fermeté. Il n'est pas originaire de la ville. Il n'a pas de famille dans l'Église. Il a été parachuté là par Paul pour régler des problèmes. Et il a un tempérament plutôt réservé. Si la confrontation n'est pas suivie d'une profonde repentance, il devra gérer une Église blessée. Le conseil d'Église aura été amputé d'un certain nombre de membres influents. L'Église aura perdu leurs supporters. Timothée sera tenté de remplacer les anciens défaillants le plus rapidement possible, pour faire comme si de rien n'était.

Surtout pas ! Paul l'avertit de ne pas imposer les mains à quelqu'un trop vite. Il est évident qu'il ne fera pas élire comme ancien quelqu'un dont les fautes s'étalent au grand jour. Mais il y a des fautes, des faiblesses, des insuffisances qui ne sont pas apparentes à prime abord : on les voit avec le temps, avec l'usage. Il faut donc qu'un futur responsable d'Église ait fait ses preuves, qu'il ait manifesté les qualités énoncées au chapitre 3, que l'Église en soit convaincue. Rien ne presse. Quelqu'un qui a les dons requis peut les exercer avec ou sans titre, ses qualités finiront par s'imposer à tous. Quelqu'un qui n'est pas qualifié ne sera pas transformé comme par magie si on l'affuble d'un titre d'ancien. Si Timothée agit trop vite pour combler les lacunes, il risque de se rendre complice des fautes de quelqu'un de pas sérieux. Ou, ce serait pire, il accepterait certains compromis en connaissance de cause. Non, il faut qu'il se garde pur. C'est un minimum.

Se garder pur

Les mots sont piégés ici. Paul veut dire se garder pur par rapport aux péchés d'autrui, surtout par rapport aux fautes d'éventuels nouveaux responsables.

Se garder pur : les militants de l'erreur imaginaient et enseignaient que l'on se gardait pur en refusant certains aliments, en rejetant le mariage, en s'abstenant de vin… Timothée doit quand même prendre du vin, pour sa santé. Tout ce que Dieu a créé est bon, et rien n'est à refuser, pourvu qu'on le prenne avec actions de grâces et prière (4.4). Timothée ne se trompera pas quand Paul lui dit de se garder pur. C'est par rapport au péché, cela n'a rien à voir avec les aliments.

Conclusion

Dans certains pays, il est inconcevable qu'on puisse mettre en cause un ancien. Son âge ou son rang le mettent au-dessus de toute critique. C'est l'un des problèmes d'Arlette aux Philippines. Même si l'ancien pèche gravement, personne n'osera l'affronter, on n'a pas le droit de lui faire perdre la face. On va se taire, on va le fuir, on va au mieux attendre qu'il meure. Du coup, on deviendra complice de tout ce qu'il fait de mal. On croira peut-être protéger la réputation de l'Église ou du corps pastoral.

Ce n'est pas ainsi que Jésus nous a appris les choses. Le respect se mérite. Il est plus important de confronter des problèmes de péché que de permettre à quelqu'un de sauver la face. La santé et la sainteté de l'Église sont plus importantes que la place ou le titre d'un responsable. Certaines confrontations sont salutaires.

Mais en temps normal, nous devons prendre soin de nos responsables. Les protéger d'accusations légères ou malveillantes. Les honorer. Et pour certains veiller à leur salaire.

Si quelqu'un aspire à être un dirigeant dans l'Église, il désire une belle tâche (3.1). On peut dire autant de ceux qui en février vont se présenter ou se représenter comme ancien ou comme diacre. Et si on a loupé quelqu'un pour le moment, parce que ses atouts sont moins visibles, qu'il se rassure : ses qualités ne sauraient rester indéfiniment cachées. Le Seigneur recrute !

Amen.