17 décembre 2006

Siméon : méditation en trois temps (Noël 2006)

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Siméon attend (1ère partie)

La joie des grands-parents à Noël, c’est de réunir autour d’une même table leurs enfants, leurs petits-enfants, et des fois leurs arrière-petits-enfants. Noël, c’est le grand carrefour des générations.

Au temple de Jérusalem, trois générations sont réunies : le petit-enfant ; ses parents ; et un homme qui s’appelle Siméon. C’est un homme qui a bien vieilli. Il n’a pas sombré dans l’aigreur ou le pessimisme. Il a la vue qui baisse, mais son regard intérieur est porté en avant, vers l’avenir, vers un avenir tout proche, un avenir qu’il attend. Il attend la consolation d’Israël, le salut d’Israël. Il attend le Christ, le Messie, l’Envoyé du Seigneur, la lumière des nations.

Il ne va pas mourir, il refuse de se laisser mourir tant qu’il n’a pas vu le Sauveur. Je me demande si, des fois, les journées ne lui semblaient pas longues. Si, des fois, il n’a pas douté. Si, des fois, il n’est pas venu au temple en vain. Mais sa longue expérience de la fidélité de Dieu et sa connaissance des Ecritures lui permettent de surmonter ces moments creux. C’est un homme qui espère.

Comme beaucoup de personnes âgées, il a le temps de revisiter les grandes étapes de sa vie. Mais quand il rumine le passé, il ne pense pas seulement à ce qu’il a vécu personnellement. Il pense aux promesses de Dieu, vieilles de 400, 700, 1000 ans. Elles sont là, dans sa Bible. Il les médite. Il les croit. Il les attend. Il attend quelqu’un.

Qui ? Un descendant du roi David. De la famille des rois. Aujourd’hui, c’est une famille qui n’a plus rien de noble. Elle est très attachée à ses origines, mais les descendants du roi ont depuis longtemps les mains calleuses des paysans et des artisans. Plus aucun ne menace de prendre le pouvoir. Mais un jour, Dieu l’a promis, il naîtra dans la famille de David et dans la ville de David le Sauveur d’Israël.

Pourquoi faire ? Siméon ne savait sans doute pas tout ce que nous savons aujourd’hui depuis que Jésus est venu. Mais il savait au moins ceci : que le fils de David relèverait son peuple en rétablissant tout ce qui est juste. Il ne pourrait pas se contenter d’agir en faveur de l’économie ou de l’indépendance. Il devrait traiter les problèmes à la racine : s’attaquer au péché, conduire son peuple dans une juste relation avec son Dieu. Et en plus – Siméon a lu le prophète Esaïe – ce fils de David serait une lumière pour les nations. Il sauverait son peuple, il sauverait le monde.

Qui peut faire cela ? Le grand arbre des rois de Juda est coupé depuis longtemps, très longtemps. Mais de ses racines, à peine visible, va sortir un rejeton, une nouvelle pousse, un rameau. Le Messie, le Sauveur, le Prince de la Paix. Siméon l’attend.

Siméon a vu (2e partie)

Ce jour-là ce sont des gens modestes qui viennent au Temple. Ce Joseph, cette Marie, ils n’ont pas les moyens d’offrir à Dieu un agneau. La loi leur permet donc de présenter l’offrande des pauvres, une paire de tourterelles ou deux jeunes pigeons. Leur enfant a six semaines.

Il a rendez-vous avec le vieux Siméon. Il ne peut rien dire, rien faire. Mais Siméon sait que c’est lui, le Messie qu’il attend. C’est lui la lumière des nations. Un petit être tout fragile. Mais de qui dépend le salut du monde.

Siméon a attendu, il a vu, il peut maintenant partir en paix. Il n’aura pas besoin d’attendre trente ans de plus pour que la destinée de l’enfant se réalise. La longue période de la promesse et de l’attente est terminée. Le plan du salut est en marche. Ni la colère d’Hérode, ni l’ignorance des foules, ni la jalousie des chefs ne pourra rien contre le dessein de Dieu. Le Christ est né.

C’est un véritable enfant des hommes. Il n’a pas d’auréole. Il n’est pas nimbé de lumière. Ceux qui le voient bébé - des bergers, Siméon, Anne la prophétesse, plus tard les mages – ils voient un vrai bébé. Mais plus tard certains comprendront que le Christ est « Dieu avec nous. » L’apôtre Jean dit que celui qui a crée les mondes est devenu homme ; l’apôtre Paul affirme que toute la plénitude de la divinité habite corporellement en lui ; l’apôtre Thomas, célèbre pour avoir douté, lui dit « Mon Seigneur et mon Dieu ».

Un texte des prophètes l’annonçait : « Car un enfant nous est né, un Fils nous est donné. Et la domination reposera sur son épaule ; on l’appellera admirable conseiller, Dieu puissant, Père éternel, prince de la paix. » Il porte à juste titre le nom qui est au-dessus de tout nom.

Voici un autre texte qui l’explique : « Lui qui, dès l’origine, était de condition divine, ne chercha pas à profiter de l’égalité avec Dieu, mais il s’est dépouillé lui-même, et il a pris la condition du serviteur. »

Un temps, le temps d’une vie bien courte, celui qui soutient toutes choses par sa Parole puissante a partagé notre condition humaine. Il était l’un de nous.

Il a fallu un certain temps pour que les disciples de Jésus comprennent que le Christ avait chois le rôle du serviteur et qu’il devait mourir sur la croix pour les péchés du monde. Il leur a fallu du temps pour comprendre que son règne de gloire n’était pas pour tout de suite. Il leur a fallu du temps pour voir en Jésus l’expression même de la gloire divine.

Siméon ne sait donc pas tout. Mais quand il voit Jésus, la paix inonde son cœur. Ce qu’il attendait s’est réalisé.

Il en est de même aujourd’hui. Nous n’avons pas besoin de tout comprendre. Mais nous avons besoin de rencontrer Jésus, et de trouver en lui l’aboutissement de nos attentes et de nos espoirs. Dieu nous a faits pour lui, et nos cœurs sont sans repos jusqu’à ce qu’ils trouvent leur repos en lui.

Siméon nous place devant un choix (3e partie)

Siméon a attendu. Siméon a vu. Et maintenant Siméon nous place devant un choix.

Cet enfant est destiné à être, pour beaucoup en Israël, une occasion de chute ou de relèvement. Il sera un signe qui suscitera la contradiction : ainsi seront dévoilées les pensées cachées de bien des gens.

Pourquoi Jésus est-il une occasion de chute ou de relèvement ? De relèvement, c’est clair, parce qu’il est venu appeler les pécheurs à la repentance. Marie-Madeleine, habitée par sept démons, instable : il lui a donné une vie nouvelle. Matthieu, le renégat, le pourri : il lui a donné une nouvelle identité, il l’a rendu à son peuple. Simon, le zélote, c’est à dire le terroriste, Jésus a fait de lui un apôtre de la paix. La venue de Jésus est une occasion de relèvement.

Il y a donc de l’espoir pour toi. Je ne sais pas ce que tu as fait, je ne sais pas quels sont tes problèmes, mais Jésus-Christ peut te relever. Si tu sais que tu es bien bas, si tu as envie d’être pardonné, purifié, relevé : Jésus est venu sur terre pour toi.

Mais il est aussi une occasion de chute. Pour qui ? Pour Judas, qui espérait comme tous les autres que Jésus régnerait dans la gloire, et que cette gloire serait partagée avec les collègues. Pour la classe des prêtres, pervertissant la justice et collaborant avec l’ennemi pour se débarrasser d’un Jésus gêneur. Pour les croyants très pratiquants, les Pharisiens, confondus par leurs incohérences et leur rigidité. Jésus a été une occasion de chute pour beaucoup de gens. Tout le monde n’avait pas envie de le suivre.

Dans la prophétie de Siméon il y a un mot encore plus fort à ce sujet. Jésus sera un signe qui suscitera la contradiction : une opposition forte, venant de partout. D’Hérode le grand, qui cherche à le faire tuer. De ses frères et sœurs, qui ne croiront pas en lui. Opposition aussi du petit peuple de Jérusalem – ceux-là même qui l’avaient acclamé, ceux-là vers qui il s’est porté en premier. Opposition des autorités religieuses et militaires, qui font passer la raison d’état avant la justice.

Résultat de la venue de Jésus : Les pensées cachées de bien des gens sont dévoilées. Derrière les grandes connaissances théologiques, un manque d’ouverture envers Dieu. Derrière la piété, la mesquinerie et l’orgueil. Derrière les beaux habits et les insignes du pouvoir, la lâcheté. Derrière l’enthousiasme, l’intérêt personnel. Cet enfant de six semaines est destiné à mettre à nu les motivations cachées et les sentiments véritables de tout un chacun.

Beaucoup de gens essaient de vivre en cachant une honte secrète. Le jeune qui fume je ne sais quoi, et qui ne veut pas que ses parents le sachent. L’homme qui regarde des films pornos à l’insu de sa femme. L’autre qui n’est pas clair avec l’argent. La femme qui est accrochée aux jeux du hasard. La personne qui n’a jamais le temps de rien faire, parce qu’elle passe cinq heures par jour devant la télé. Vous en connaissez, des gens comme cela. Peut-être que vous en êtes…

Jésus est une occasion de chute. Il suscite de l’opposition. Il dévoile les pensées secrètes. Jésus est une occasion de relèvement. Il est allé jusqu’à la croix pour être le Sauveur de tous les peuples et la lumière des nations.

Siméon a attendu. Il a vu. Il nous place devant un choix. Après les bonbons et les petits-salés, serons-nous dans la paix ? Ou en contradiction avec Jésus ? Dans la joie parce qu’à Noël on va tout oublier ? Ou dans la joie à cause du Sauveur ?

Siméon est parti depuis bien longtemps maintenant. Mais il nous parle encore aujourd’hui. Que nous aussi, nous puissions quitter le temple dans la paix !

Amen