Liberté et responsabilité (Galates 4)
Introduction
En début d'année nous avons commencé à étudier l'une des lettres de l'apôtre Paul, l'épître aux Galates. Puis, les événements se sont succédé : un échange avec Villeneuve-le-Comte, un baptême, Pâques, le mois de la famille, Pentecôte. L'épître aux Galates est passée à la trappe. J'aimerais la retrouver ce matin, pour vous parler de la liberté et de la responsabilité.
J'étais en voiture avec Michèle et Bernhard, nous parlions de leur vie en Tunisie. Et Bernhard a fait remarquer qu'en terre d'islam la loi religieuse couvre tous les aspects de la vie. Je me suis dit que chez les Pharisiens du temps de Jésus, c'était pareil : des lois pour réglementer dans le détail la nourriture, le travail, les serments, les actes interdits, les actes autorisés. Les gens réellement pieux offraient à Dieu dix pour cent des récoltes - jusqu'aux feuilles de menthe poussant dans leur jardin.
Et puis je me suis dit que dans l'Évangile, c'est totalement différent. Au lieu d'ergoter sur la dîme des feuilles de menthe, l'apôtre Paul a encouragé les chrétiens à la liberté et à la responsabilité. Que faut-il manger ? Quels jours faut-il fêter ? Que chacun aie sa propre conviction et qu'il glorifie Dieu dans tout ce qu'il fait. Il aurait été tellement plus simple à l'époque d'interdire le porc et d'imposer le respect du sabbat. Paul refuse de le faire.
C'est dans l'épître aux Galates que nous voyons pourquoi.
Je vous rappelle le contexte. Paul et Barnabas ont annoncé l'Evangile dans le sud de ce que nous appelons la Turquie. Plusieurs Églises sont nées. Elles sont composées en majorité de gens issus du paganisme. Après le départ des apôtres, ces Églises reçoivent la visite de prédicateurs qui leur disent que les vrais chrétiens doivent se soumettre à toutes les lois de Moïse : la circoncision, le sabbat, les aliments, et j'en passe. C'est faux ! Cela divise l'Église ! On oublie que c'est Christ qui nous sauve, pas la Loi de Moïse ! Et on embrigade les enfants spirituels de l'apôtre au profit d'une fausse doctrine !
Sachant cela, nous pouvons maintenant lire une partie de l'épître aux Galates. Je vais commencer au chapitre 3, au verset 23.
Lecture Galates 3.23-4.11
Etre sous la loi = un esclavage
Le premier point de l'apôtre Paul, au chapitre 4, est de dire que ceux qui sont encore sous le régime de la Loi de Moïse sont comme des enfants qui n'ont pas encore atteint leur majorité, et que l'enfant mineur n'est pas très différent de l'esclave. C'est quand même fort. Paul lui-même a été élevé dans le respect le plus strict de la Loi. Mais il dit que la Loi de Moïse est comme un domestique chargé de la garde des enfants. La Loi doit conduire à Jésus-Christ. Après, son travail est fait. C'est Christ qui nous sauve de nos péchés, c'est en Christ que nous avons la vie éternelle, c'est Christ qui fait de nous de véritables enfants de Dieu. Il nous libère, verset 5, de la tutelle de la loi.
Je trouve frappant que l'apôtre compare son passé, et le passé de tout son peuple, à une sorte d'enfance, à une sorte d'esclavage. L'enfant mineur doit obéir à tout, il ne peut être responsable de rien, il est en attente. Un jour l'enfant sera majeur, un jour il héritera de tout. L'esclave peut être émancipé et adopté. Mais en attendant ils n'ont aucun droit, aucune liberté, ni l'un ni l'autre.
Spirituellement parlant, ceux qui sont sous le régime de la loi, verset 3, sont esclaves de principes élémentaires qui régissent la vie dans ce monde. Quel que soit notre arrière-plan religieux, juifs, chrétiens, musulmans, nous avons peut-être grandi dans ce cadre-là, dans le cadre de ces principes religieux universels dont la loi. Être sous la tutelle de la loi, c'est un esclavage.
Le paganisme = un esclavage
En deuxième lieu, au verset 8, Paul se tourne vers les païens. Ils adoraient les grands dieux de Grèce et de Rome, ils honoraient les petites divinités de la maison et du village, ils étaient superstitieux, ils avaient peur des esprits. Autrefois, vous ne connaissiez pas Dieu, c'est pourquoi vous serviez comme des esclaves des divinités qui, en réalité, ne sont pas Dieu. Ils ne connaissaient pas l'unique Dieu créateur. Ils connaissaient encore moins ses lois, qui auraient pu limiter certains dégâts, qui auraient pu les conduire à Christ. Ils n'étaient pas enfants mineurs, destinés à un avenir meilleur : ils étaient esclaves.
Il ne faut pas aller jusqu'en Afrique ou en Haïti pour trouver ces divinités-là. La magie, les superstitions des campagnes françaises ne sont pas mortes. Elles émigrent même vers les villes. Elles sont très présentes dans le monde du sport et du spectacle. Parfois elles se donnent des couleurs chrétiennes. Mais elles vous emprisonnent toujours dans la crainte des forces qui ne sont pas Dieu.
Paganisme et régime de la loi, c'est du pareil au même !
Et maintenant, dit Paul, dans les versets 9 et 10, vous les païens convertis à Christ, vous faites marche-arrière. Vous ne retournez pas vers votre paganisme d'origine, vers Zeus et Mercure, mais vous voulez vous mettre sous le régime des principes religieux élémentaires, vous voulez vous mettre sous le régime de la loi. C'est la même chose qu'un retour au paganisme ! La même chose, tellement la vie en Christ est différente de tout cela !
C'est le monde à l'envers, non ? Ils abandonnent le culte des idoles. Ils abandonnent l'immoralité qui va avec. Ils s'intéressent à la Loi de Moïse, ils commencent à vouloir la mettre en pratique, depuis la circoncision jusqu'aux lois alimentaires. Et au lieu de les féliciter d'être des gens sérieux, des chrétiens consacrés, de vrais disciples, zélés pour Dieu, l'apôtre les gronde. Il leur dit que ce zèle pour Dieu, c'est du paganisme déguisé, c'est un retour en arrière. Au lieu de vivre sous le régime de la liberté en Christ, ils préfèrent un nouvel esclavage. C'est fort, non ?
Plus on s'interdit des choses, mieux on plaît à Dieu ? Non ! Plus on va à des réunions, plus on plaît à Dieu ? Non ! Plus on met dans l'offrande, plus on plaît à Dieu ? Non ! La loi de Jésus-Christ, c'est une loi de liberté et de responsabilité.
Dans les versets 12 à 20 Paul appuiera son enseignement en citant son exemple personnel. Puis à partir du verset 21 il va utiliser une image. C'est là que je reprends la lecture, pour le dernier point à souligner. Les familles polygames de la Bible ont toujours des histoires. Ce sera le cas ici.
Lecture Galates 4.21-5.1
Les deux communautés
Si vous trouvez cette lecture un peu étrange, sachez que vous n'êtes pas seuls ! C'est que Paul passe des deux fils et des deux femmes d'Abraham à une image. Les deux femmes, ce sont Sara, sa femme de toujours, et Agar, la domestique égyptienne qui avec le consentement de Sara deviendra une sorte de mère porteuse. Quand Sara ne peut plus avoir d'enfant, et qu'Abraham désespère de mourir sans héritiers, ils imaginent une stratégie courante à l'époque pour qu'Agar ait un enfant qui légalement sera l'enfant de Sara. Agar a eu cet enfant par les moyens les plus naturels du monde, il s'appelle Ismaël. Mais ce n'était pas l'enfant promis par Dieu. Ce n'était pas l'enfant de la foi, l'enfant de la promesse, l'enfant du miracle. Celui-là, c'est Sara qui le portera, il s'appellera Isaac, et c'est lui qui sera l'héritier d'Abraham, et le porteur du grand projet de Dieu.
Ismaël sera ainsi pour l'apôtre Paul le symbole de ceux qui sont physiquement les descendants d'Abraham sans avoir la foi d'Abraham, et donc sans être justifiés par la foi comme Abraham. Isaac, par contre, c'est le symbole de ceux qui ont la foi d'Abraham, qui à travers Christ sont justifiés et sauvés par la foi. D'ailleurs, Abraham et Isaac sont les ancêtres de Jésus-Christ. Ceux qui appartiennent à Christ par la foi sont les enfants d'Abraham par la foi.
Les deux enfants symbolisent donc deux communautés : celle de la descendance physique, et celle de la descendance spirituelle.
C'est la même chose avec les deux mamans. Agar symbolise la maternité physique, la communauté physique, Jérusalem au sens physique. Agar, c'est le régime de la Loi, c'est l'esclavage. Sara symbolise par contre la maternité spirituelle, la communauté spirituelle, Jérusalem au sens spirituel. Celle-là, elle est libre. A tous ces nouveaux chrétiens tentés de trouver leur identité en se rattachant à Jérusalem, Paul dit qu'en Christ leur identité, leur cité, leur patrie, c'est la Jérusalem céleste.
Le chrétien est libre
Et la leçon que Paul tire de cela, c'est que le chrétien lui aussi est libre. Il n'est pas sous la tutelle de la Loi, il n'est pas inféodé à la ville de Jérusalem ni même à l'Église de Jérusalem. Le Christ nous a rendus libres pour que nous connaissions la vraie liberté. C'est pourquoi teniez bon et ne vous laissez pas réduire à nouveau en esclavage (5.1). Et l'esclavage en question, c'est justement le respect des jours, des lois alimentaires, de la circoncision, etc. Cette loi religieuse qui régit tous les aspects de la vie. Et qui, dans les faits, donne lieu à des discussions et des divisions sans fin.
Est-ce un danger pour nous ? Oui, si nous écoutons certains mouvements religieux. Avoir une religion ou simplement un pasteur qui vous dit tout, c'est sécurisant. La liberté peut faire peur. La loi vous tranquillise tout en provoquant des ruptures et des divisons quand les gens ne sont pas d'accord sur la façon de l'appliquer.
Le chrétien est responsable
Mais peut-être que nous courons aujourd'hui un risque plus grave que celui d'un retour à la Loi. Peut-être sommes-nous tentés d'abuser de la liberté et d'oublier nos responsabilités.
Les adversaires de Paul devait l'accuser de mollesse, de compromis : il fait des concessions pour gagner plus d'adeptes. Et si par-dessus le marché il enseigne que les chrétiens ne sont plus sous la tutelle de la loi, c'est la porte ouverte au péché dans l'Église ! Je suis sûr qu'on pourrait nous dire la même chose à Ozoir.
Dans la dernière partie de l'épître Paul parlera donc de la vie en Christ, la vie sous la conduite du Saint-Esprit. Quand nous sommes libres, nous sommes en même temps responsables. Nous ne pouvons pas vivre en esclaves du péché. Nous sommes libres en Christ, nous devons donc chercher à lui plaire. Nous avons reçu le Saint-Esprit qui nous permet d'appeler Dieu notre Père. Nous devons donc porter le fruit de l'Esprit.
Il y a d'autres esclavages que ceux de la Loi ou de l'idolâtrie. ON peut être esclave de certaines substances, d'une passion, du péché. Le chrétien est appelé à être libre.
Si nous sommes libres et responsables, cela se verra dans un tas de domaines : l'amour les uns pour les autres, la générosité, le zèle pour témoigner, une disposition à pardonner, la sainteté, l'esprit de service Quand nous serons devant des choix, nous nous demanderons : Qu'est-ce qui glorifie le Seigneur ? Qu'est-ce qui aide les autres à marcher dans la foi ? Qu'est-ce qui édifie l'Église ? Nous serons responsables et libres.
Conclusion
C'est tellement différent de la religion des Pharisiens. Tellement différent de la loi religieuse que l'on va étudier dans le talmud ou qu'on va appliquer en terre d'islam. Et ce n'est pas Paul qui l'a inventé, c'est Jésus.