10 février 2008

Les dix jeunes filles de Matthieu 25

Prédicateur:
Passage: Matthieu 25

Introduction

Ces derniers jours nous avons lu dans le Nouveau Testament 5 minutes le chapitre 25 de Matthieu : ce sont des paraboles que Jésus a prononcées juste avant sa mort. La parabole des brebis et des boucs, qui est une parabole sur le jugement dernier. La parabole des talents, qui nous dit que nous devons faire fructifier le capital que Dieu nous prête. Et la parabole des dix jeunes filles, ou des dix vierges, qui nous dit que nous devons être prêts à rencontrer le Seigneur à tout moment.

Les paraboles ne sont pas toujours faciles à comprendre. C’est une forme d’enseignement qui s’est perdue très vite. Quand Jésus enseignait de cette façon-là, une partie de l’assistance ne comprenait pas ce qu’il disait. Les gens venaient lui poser des questions après. Et parfois l’explication est conservée dans nos Evangiles, parfois pas. Quand il n’y a pas d’explication dans les Evangiles, nous nous trouvons dans la même situation que les tout premiers auditeurs. Nous devons nous creuser les méninges pour comprendre. Nous devons nous laisser travailler. Nous devons souffrir un peu.

A plusieurs d’entre nous la parabole des dix jeunes filles pose un problème. C’est pourquoi je me propose d’essayer de voir plus clair avec vous ce matin.

Avant d’entamer la réflexion, nous allons lire Matthieu 25, les versets 1 à 13.

Lecture

Qu’est-ce qu’une parabole ?

Dans le langage de la Bible, une parabole n’est pas une antenne de télévision. C’est une histoire. C’est une histoire qui fait des parallèles. C’est une histoire qui fait des comparaisons.

Parfois il y a beaucoup de points de comparaison, comme dans la parabole du semeur. Mais généralement, les paraboles ont une seule chose à nous apprendre, pas trente-six. Dans la parabole du bon Samaritain, par exemple, nous sommes invités à porter secours à tous ceux qui sont dans le besoin. Nous ne nous demandons pas ce que représentent Jérusalem et Jéricho, ce que représentent l’huile et le vin, ce que représentent l’auberge et les deux pièces d’argent et l’âne. Nous devons simplement nous demander : Comment puis-je être proche de quelqu’un dans le besoin. C’est déjà pas mal.

Et dans la parabole des dix jeunes filles ? A priori, la pointe de l’histoire est au verset 13 : Tenez-vous en éveil, car vous ne savez ni le jour ni l’heure. C’est tout, et c’est beaucoup.

Le royaume des cieux

La parabole des dix jeunes filles parle du royaume des cieux, verset 1. Tantôt les évangiles parlent du royaume des cieux, tantôt ils parlent du royaume de Dieu, c’est la même chose. En bon Juif, Matthieu aime mieux dire le royaume des cieux, pour ne pas mettre le nom de Dieu à toutes les sauces. Mais c’est la même chose.

La plénitude du royaume de Dieu n’est pas encore venue. C’est pourquoi Jésus nous enseigne à prier : Que ton règne vienne ! La plénitude du royaume n’est pas encore venue, mais Dieu règne sur l’univers. Et Jésus a employé de nombreuses paraboles pour expliquer comment Dieu s’y prend. Le royaume de Dieu, dans les paraboles, ce n’est pas l’Eglise. Surtout pas. L’une des paraboles compare le royaume de Dieu à un champ ou il y a du blé et de mauvaises herbes. Et Jésus dit explicitement : Le champ, c’est le monde. Ce n’est pas l’Eglise. La parabole des dix jeunes filles concerne de façon très générale le règne de Dieu sur le monde.

L’histoire d’une noce

C’est l’histoire d’un mariage. Des jeunes filles vont accompagner le marié – avec la mariée, je l’espère – dans la salle de noces. Ce sera le soir, la nuit sera tombée, elles formeront une garde d’honneur avec des lampes.

J’ai toujours imaginé des petites lampes en poterie, avec une mèche qui sort par un bout et une poignée à l’autre bout. C’est l’image qu’on m’a montrée à l’école de dimanche et que j’ai vu parfois dans des livres sur la vie courante de l’époque.

Mais un commentaire m’a mis sur une autre piste. J’ai regardé dans un dictionnaire grec-français et dans la Bible du Semeur d’étude. Les lampes seraient probablement des torches, c’est à dire des bâtons dont le bout est enveloppé avec du tissu imbibé d’huile. Il s’agirait d’un accueil aux flambeaux, un accueil triomphal. J’étais très surpris de voir le nombre de mots dans le dictionnaire (Bailly) qui tournent autour de cette idée : la présidence de la course aux flambeaux ; convertir en flambeaux ; porter une torche dans une course aux flambeaux ; prendre soin des flambeaux… au total 13 mots différents qui tournent autour de cela. Chez les Grecs, en tout cas, porter des flambeaux pour des occasions spéciales, c’était la coutume.

Si vous mettez le feu à une torche sans qu’il y ait de l’huile, le tissu va flamber, puis tout va s’éteindre. Et c’est ce qui se passe pour cinq des jeunes filles dans l’histoire. Elles ne sont pas prêtes, elles n’ont pas d’huile. Ce n’est pas qu’elles n’en ont pas assez, le texte dit littéralement qu’elles n’avaient pas d’huile. Les cinq filles sages en ont pris dans des flacons.

L’arrivée du marié est donc une fête pour les unes, une catastrophe pour les autres. Elles paniquent. Mais c’est trop tard. Le marié arrive, ceux qui l’attendent entrent dans la salle de noces, on ferme la porte. On ferme la porte, comme on le fait beaucoup dans ces pays-là, on ne sait pas quel voleur peut passer. Et pour celles qui ne sont pas prêtes, c’est trop tard. Le marié leur dit : Je ne sais pas qui vous êtes. Ou, littéralement : Je ne vous connais pas.

Le royaume de Dieu, c’est comme cela. La venue du Christ, c’est comme cela. Le jugement dernier, c’est comme cela. Quelle leçon en tirer ? Tenez-vous donc en éveil, car vous ne savez ni le jour ni l’heure.

Est-ce qu’il faut pousser les détails de la parabole plus loin ? Je ne le pense pas. C’est déjà assez fort comme cela. Si nous disons que l’huile représente le Saint-Esprit, nous allons nous embourber dans des explications trop compliquées. Comment les cinq filles sages pourraient-elles donner le Saint-Esprit aux autres ? Et si elles le donnaient, il ne resterait pas en même temps avec elles ? Elles le perdraient ? Elles le perdraient en partie ? Qui sont les marchands qui vendent le Saint-Esprit ? Comment se fait-il que les cinq demoiselles insensées ont pu l’acheter ? On peut recevoir l’Esprit, mais trop tard ?

Il est vrai que parfois dans la Bible l’huile représente le Saint-Esprit. Mais pas dans la parabole du bon Samaritain, c’est simplement une pommade pour des plaies superficielles. Pas dans la parabole des dix jeunes filles, c’est simplement un combustible. Si nous allons au-delà du sens premier, nous aboutissons à des non-sens. Et, pire, nous perdons de vue l’essentiel : il faut être prêt. Jésus-Christ va venir on ne sait pas quand. Il peut tarder, comme le marié dans notre histoire. Il faut être prêt.

C’est quoi, alors, être prêt ?

C’est quoi alors, être prêt ? Jésus dit : Tenez-vous donc en éveil. Dans la parabole, le sommeil n’est pas en fait un problème. Les dix jeunes filles s’endorment toutes. Elles s’éveillent toutes au même moment. Qu’est-ce que Jésus veut dire alors : Tenez-vous en éveil ?

Manifestement, nous changeons d’image. Au lieu de dire : soyez prêts, ou : soyez bien équipés, Jésus dit : Ne vous endormez pas, ne rêvez pas, soyez sur vos gardes, n’imaginez pas que vous avez toute votre vie devant vous. Vous pouvez être très surpris, comme les cinq demoiselles qui n’avaient pas d’huile.

A qui Jésus dit-il cela ? Pas aux grandes foules. Pas aux responsables religieux. Il le dit à ses disciples. Un groupe assez grand, sans doute, plus que les 12, plutôt comme les soixante-douze disciples qui ont été envoyés en mission en Luc 10. Parmi les 12 apôtres, il y avait Judas. Parmi les 72 envoyés en mission, il y en avait sûrement aussi des gens n’allaient pas tenir la route. A tous, Jésus leur dit de faire attention.

Matthieu l’a noté dans son Evangile pour que tous ceux qui se trouvent dans les Eglises fassent attention. Vous vous souvenez de la parabole du Semeur ? De jeunes pousses se lèvent sur presque tous les terrains. De petits plants tout beaux, tout verts, tout mignons. Mais un seul groupe de plants tient et porte du fruit.

De par le monde, il y a beaucoup de gens dans les Eglises : tous n’ont pas forcément la vie de Dieu en eux. Tous ne sont pas forcément nés de nouveau. Tous ne vont pas forcément porter un fruit qui dure. Au chapitre 7 de Matthieu il est même question de gens qui font des miracles au nom de Jésus ou qui prophétisent au nom de Jésus et à qui Jésus dira : Je ne vous ai jamais connus. Dans la première épître de Jean il est question de personnes qui enseignent de fausses doctrines : Ces adversaires du Christ sont sortis de chez nous mais, en réalité, ils n'étaient pas des nôtres. Car, s'ils avaient été des nôtres, ils seraient restés avec nous. Mais ils nous ont quittés pour qu'il soit parfaitement clair que tous ne sont pas des nôtres (1 Jean 2.19).

Cela pose un problème, et cela apporte la réponse. Le problème, c’est que cela donne l’idée que le chrétien peut perdre son salut. Et la réponse, c’est que tous ceux qui sont dans les Eglises ne sont pas forcément de vrais chrétiens. Qu’est que le salut, si on peut le perdre ? Qu’est-ce que la nouvelle naissance, si on peut dé-naître ? Qu’est la conversion, le passage de la mort à la vie, l’adoption dans la famille de Dieu, le don de la vie éternelle si Dieu peut faire marche arrière ? Dieu ne se repent pas de ses dons et de son appel, dit la Bible.

On peut donc s’éloigner de Dieu et revenir, comme Pierre quand il a renié le Christ, comme plusieurs d’entre nous ce matin. La repentance, c’est beau ! Mais si à la longue il n’y a pas de retour, nous dirons sans doute comme Jean : Ils n’étaient pas des nôtres.

Le cœur humain est tortueux, dit la Bible. Nous nous faisons facilement des illusions. Et cela veut dire que même après une conversion aussi radicale que celle de Saul de Tarse sur le chemin de Damas nous devons faire attention. Nous laisser aller, nous endormir, faire comme si on pouvait vivre sans Dieu : ce serait nous aligner avec ceux qui ne l’ont jamais connu.

Conclusion

N’est-ce pas qu’elle est troublante, la parabole des dix jeunes filles ? Elle nous dit que dans le monde il y en a qui sont équipés pour rencontrer le Seigneur, et d’autres pas. Elle nous dit que le Seigneur va revenir à un moment qui nous surprendra. Elle nous invite tous à ne pas nous endormir sur nos lauriers. Elle nous rend attentifs à l’enseignement qui va être donné dans la suite du chapitre : sur notre façon de servir Dieu, ou pas ; sur notre façon de secourir les hommes, ou pas.

Tenez-vous donc en éveil, car vous ne savez ni le jour ni l’heure.

Prière


La parabole des dix jeunes filles

Bible du Semeur

Mt 25,1 -Ce jour-là, il en sera du royaume des cieux comme de dix jeunes filles qui prirent leurs lampes et s'en allèrent à la rencontre du marié.

Mt 25,2 Cinq d'entre elles étaient insensées, les cinq autres étaient avisées :

Mt 25,3 les jeunes filles insensées prirent leurs lampes sans penser à emporter de réserve d'huile,

Mt 25,4 mais celles qui étaient avisées prirent, avec leurs lampes, des flacons contenant de l'huile.

Mt 25,5 Comme le marié se faisait attendre, elles s'assoupirent toutes et finirent par céder au sommeil.

Mt 25,6 A minuit, un cri retentit : " Voici l'époux ! Allez à sa rencontre ! "

Mt 25,7 Toutes les jeunes filles se levèrent et préparèrent leurs lampes.

Mt 25,8 Alors les jeunes filles insensées s'adressèrent à celles qui étaient avisées : " Donnez-nous de votre huile, car nos lampes sont en train de s'éteindre. "

Mt 25,9 Mais celles-ci leur répondirent : " Non ! Il n'y en aurait jamais assez pour nous et pour vous. Courez plutôt vous en acheter chez le marchand. "

Mt 25,10 Elles partirent en chercher. Pendant ce temps, le marié arriva : celles qui étaient prêtes entrèrent avec lui dans la salle de noces, et l'on ferma la porte.

Mt 25,11 Plus tard, les autres jeunes filles arrivèrent à leur tour ; mais elles eurent beau crier : " Seigneur, Seigneur, ouvre-nous ! "

Mt 25,12 Il leur répondit : " Vraiment, je vous l'assure : je ne sais pas qui vous êtes. "

Mt 25,13 C'est pourquoi, ajouta Jésus, tenez-vous en éveil, car vous ne savez ni le jour, ni l'heure de ma venue.