28 mai 2006

Fête des mères

Prédicateur:

Introduction

Est-ce que nous avons envie de ressembler à notre mère ? Surtout pas, disons-nous, beaucoup d'entre nous ! Et en même temps nous l'aimons, ou nous l'avons aimée. Nous avons du respect pour elle, nous savons qu'elle n'a pas eu la vie facile, qu'elle s'est battue, qu'elle nous a communiqué énormément de bonnes choses. Nous sommes ce que nous sommes à cause de notre mère. Nous voulons lui ressembler alors ? Toujours pas.

Parce que nous nous sommes construits dans sa dépendance, tout en lui arrachant notre indépendance. Nous avons dû nous affirmer face à elle, contre elle. Un jour, nous ne voulions plus qu'elle nous couve. Qu'elle nous dise de mettre un pull, de ranger notre chambre, de faire nos devoirs. Et le même jour, nous étions bien contents de trouver dans le placard des vêtements propres et de trouver dans notre assiette un plat bien chaud.

Nous avons eu du mal à devenir adultes face à elle. De couper le cordon ombilical une deuxième fois. Notre mère, nous l'adorions. Puis nous avons découvert que notre idole avait des pieds d'argile : elle se fâche, elle panique, elle a du mal à faire un créneau, elle est trop têtue, elle est trop lâche, elle n'est pas à la mode… Et puis, devenus parents ou en tout cas adultes, nous avons commencé à nous rendre compte qu'il n'est pas facile d'être mère. Nous sommes peut-être arrivés à dire avec le proverbe : Comprendre, c'est tout pardonner.

La relation à la mère, relation intense, relation d'amour et de tendresse. Elle engendre aussi la souffrance : manipulation, domination, conflit, rejet.

« Honore ton père et ta mère. »

Je me demande si nous ne pouvons pas profiter de trois exemples bibliques pour mieux apprécier ce qu'est une mère. Et le dis particulièrement à l'adresse des hommes qui sont parmi nous. Etre homme ou femme, être père ou mère, ce n'est pas la même chose. Vraiment pas. Mais la Bible contient de nombreux exemples qui ne correspondent pas aux caricatures de ce qui est masculin ou féminin. Le courage, par exemple, c'est un attribut des hommes ou des femmes ? Les deux, mon capitaine. Enseigner, communiquer la sagesse ? Dans le livre des Proverbes, ce sont le père et la mère qui le font. Aimer ? Hommes et femmes sont appelés à aimer, à se donner. Sans doute que l'expression de toutes ces valeurs change d'une personne à l'autre, d'un sexe à l'autre. Mais le fond, c'est pareil pour tous les humains.

L'amour d'une mère : l'apôtre Paul

Mon premier exemple, alors, c'est l'apôtre Paul quand il écrit à de nouveaux chrétiens à Thessalonique. Voici ce qu'il leur dit.

1Thes 2,7  En tant qu'apôtres du Christ, nous aurions pu vous imposer notre autorité. Au contraire, pendant que nous étions parmi vous, nous avons été pleins de tendresse. Comme une mère qui prend soin des enfants qu'elle nourrit,

1Thes 2,8  ainsi dans notre vive affection pour vous, nous aurions voulu, non seulement vous annoncer l'Evangile de Dieu, mais encore donner notre propre vie pour vous, tant vous nous étiez devenus chers.

1Thes 2,9  Vous vous souvenez, frères, de nos travaux et de toute la peine que nous avons prise. Tout en travaillant de nos mains jour et nuit pour n'être à charge à aucun de vous, nous vous avons annoncé la Bonne Nouvelle qui vient de Dieu.

Voilà l'apôtre qui avait un fort caractère, qui avait un mandat de la part de Jésus-Christ, qui aurait pu se conduire avec autorité. Mais il dit qu'il a été plein de tendresse, comme une mère. C'est étonnant, non ? Paul a la réputation d'être un dur, un fonceur, un homme exigeant. Et il parle de tendresse.

C'est une qualité bien maternelle. Quand le petit garçon tombe de son vélo, qui est-ce qui le console ? C'est la mère. Qui est-ce qui est attentif aux blessés de la vie ? C'est plutôt la mère. Les psychologues disent que la mère est pour l'enfant le pôle de la tendresse, et le père est celui qui donne la loi, qui fixe le cadre, qui structure. On ne va pas se battre contre ça, c'est inscrit en nous.

Mais le père doit aussi être capable de tendresse, comme Paul. Tendresse envers ses propres enfants et envers son prochain. Il ne l'exprimera pas de la même manière qu'une mère. Mais s'il n'a pas un cœur tendre, il lui manque quelque chose. Il n'est pas pleinement homme s'il n'a pas de tendresse.

Comment est-ce que cela s'est exprimé chez Paul quand il était à Thessalonique ? Dans ses émotions : ces nouveaux chrétiens lui étaient devenus très chers. Dans un dévouement extrême : il aurait voulu leur donner sa propre vie. Il a pris sur lui de travailler dur pour ne pas leur être à charge. Il n'a pas lésiné sur les moyens pour les nourrir de la Parole de Dieu. Il ne les a pas chouchoutés : il les a instruits. C'était un engagement très viril. Mais il avait la tendresse d'une mère qui nourrit son petit.

L'amour d'une mère : Jésus-Christ

Mon deuxième exemple maternel est celui de Jésus-Christ. Jésus est pour moi l'exemple parfait de l'homme que je veux être, et j'en suis encore loin. Un chef qui veut servir. Fidèle en amitié. Ferme devant la critique. Véridique. Sensible à la souffrance des autres. Prévoyant. Pédagogue. Inébranlable sous les coups. Viril. Mais pas macho.

Dans un passage, il se compare à une mère.

Mt 23.37-39, Ah, Jérusalem ! Jérusalem ! Toi qui fais mourir les prophètes et qui tues à coups de pierres ceux que Dieu t'envoie ! Combien de fois j'ai voulu rassembler tes habitants auprès de moi comme une poule rassemble ses poussins sous ses ailes ! Mais vous ne l'avez pas voulu !

Nous sentons ici l'amour de Jésus pour cette ville qui va bientôt le rejeter. Il est triste parce que l'histoire se répète. Encore une fois Jérusalem va tourner le dos à Dieu, va envoyer sur les roses le messager de Dieu, va rater une occasion de changer de vie et de trouver le salut. C'est l'ultime occasion et elle sera ratée. Un autre passage dit que Jésus pleura sur Jérusalem (Luc 19.41). Elle est à la croisée des chemins, et elle va prendre la mauvaise.

Jésus aurait tant voulu faire comme la mère poule, rassembler ses poussins pour les protéger. Mais pour cela, il aurait fallu que les poussins soient consentants.

Souci du bien-être de ces gens, souci de leur salut, souci aussi de leur unité, qu'ils ne trouveraient qu'en lui.

La mère poule n'a pas bonne presse. Mais pourquoi donc ouvre-t-elle ses ailes, pourquoi les poussins accourent-ils ? Parce qu'ils trouvent sous les ailes de leur mère une protection contre les prédateurs, ou contre la pluie, ou contre le soleil qui tape. C'est très bien ainsi. On dit même que quand certaines espèces sont rattrapées par des feux de forêt, la mère se sacrifie littéralement pour que les petits puissent avoir une chance de s'en sortir. Je crois que la mère poule, elle est injustement calomniée. Parce qu'elle se donne, elle se met en première ligne pour la défense de ses petits.

Et pourtant, si l'expression française est plutôt négative, c'est parce qu'il peut y avoir quelque chose de pervers dans l'amour d'une mère. Elle peut aimer pour être aimée. Elle peut s'efforcer par tous les moyens de s'attacher l'enfant ou le mari parce qu'elle a un besoin criant d'affection. On peut aimer pour posséder, aimer pour satisfaire ses propres attentes, aimer par intérêt, aimer comme si les autres étaient des objets destinés à nous faire plaisir. Si tel est notre amour, on nous fuira pour être libre.

Jésus n'a pas aimé comme ça. Il n'y avait pas de manque en lui qui réclamait d'être comblé. Il a aimé d'une façon désintéressée. Le feu de forêt est passé sur lui pour que nous ayons la vie sauve.

Messieurs, si Jésus a pris tellement à cœur les intérêts des habitants de Jérusalem, nous aussi nous avons à sortir de notre égoïsme naturel pour penser aux autres. Leur bien-être. Leur sécurité. Leur salut. Ce sera parfois en pure perte. On peut refuser notre main tendue comme on a refusé l'amour du Christ. Mais notre responsabilité, c'est d'aimer.

L'amour d'une mère : Dieu

Mon troisième exemple se trouve en Esaïe, au chapitre 66. C'est Dieu qui parle à son peuple :

Es 66,13   Comme un enfant que sa mère console, je vous consolerai. Oui, dans Jérusalem, vous serez consolés. "

La même image se trouve dans le Psaume 131 :

Ps 131,1   O Eternel, mon cœur ne s'enfle pas d'orgueil, mes yeux n'ont pas visé trop haut, je ne me suis pas engagé dans des projets trop grands, trop élevés pour moi.

Ps 131,2   Bien au contraire : je suis resté tranquille et dans le calme. Je me sentais comme un nourrisson rassasié dans les bras de sa mère, comme un nourrisson apaisé.

Ps 131,3   Israël, mets ton espérance en l'Eternel, dès maintenant et pour toujours.

Celui qui met son espérance en Dieu, celui que Dieu console, il se trouve être comme un enfant dans les bras de sa mère.

Ce n'est pas le portrait habituel de Dieu. Le Créateur, le juge, le roc, le vaillant guerrier, le père. On peut même dire que c'est exceptionnel de parler de Dieu comme ça, comme une mère qui console. Mais la Bible est inspirée ou elle ne l'est pas. Cette image, inhabituelle, est légitime, elle est révélatrice de la plénitude de l'amour de Dieu. L'amour d'un père terrestre ou d'une mère terrestre ne dira jamais complètement l'amour du Père céleste. Il est plus riche, plus complet, il a des facettes qui nous associons et à un père, et à une mère.

Je ne vois pas dans la Bible la dureté des hommes qui disent : Un homme, ça ne pleure pas. Qui n'arrivent pas à caresser la tête de leurs enfants. Qui méprisent et qui ridiculisent leur épouse. Qui écrasent tout sur leur passage. Je vois plutôt de la tendresse jusque dans le cœur de Dieu. La tendresse et la vérité et la fermeté et la justice et l'amour : un ensemble de qualités que nous sommes tous appelés à développer à notre tour, tant les hommes que les femmes.

Rassurez-vous, je n'ai pas envie de changer le Notre Père en une prière adressée à Notre Mère qui est dans les cieux. Dieu s'est révélé surtout comme un père. Mais il se compare des fois à une mère. Comme Jésus. Comme l'apôtre Paul.

Conclusion

Quelles leçons pouvons-nous tirer de ce constat ?

D'abord deux réflexions pour celles d'entre nous qui sont mères ou qui vont l'être. L'amour d'une mère n'est pas que tendresse. Et il n'est pas égoïste. Il n'est pas que tendresse : il y a aussi de la fermeté dans les exemples que j'ai cités. Il n'est pas égoïste : il ne transforme pas l'enfant en nounours pour grandes personnes. Il donne, il se donne, pour le bien de l'enfant. Vous le savez.

Ensuite deux réflexions pour ceux d'entre nous qui sommes pères, ou qui vont l'être. La mère de nos enfants a besoin d'être soutenue et valorisée par le père. Parce qu'être mère, c'est exigeant et c'est noble. Puis le père que nous sommes doit savoir exprimer sa tendresse envers ses enfants. Si nous ne le faisons pas, il nous maque quelque chose.

Et pour finir une réflexion pour nous tous qui avons une mère. Tout imparfaite qu'elle est, elle mérite notre respect et notre amour.

La Bible le dit.

Amen.

L'apôtre Paul : 1 Thessaloniciens 1.2-9

 

En tant qu'apôtres du Christ, nous aurions pu vous imposer notre autorité. Au contraire, pendant que nous étions parmi vous, nous avons été pleins de tendresse. Comme une mère qui prend soin des enfants qu'elle nourrit, ainsi dans notre vive affection pour vous, nous aurions voulu, non seulement vous annoncer l'Evangile de Dieu, mais encore donner notre propre vie pour vous, tant vous nous étiez devenus chers.

Vous vous souvenez, frères, de nos travaux et de toute la peine que nous avons prise. Tout en travaillant de nos mains jour et nuit pour n'être à charge à aucun de vous, nous vous avons annoncé la Bonne Nouvelle qui vient de Dieu.

 

Jésus-Christ : Matthieu 23.37-39

 

Ah, Jérusalem ! Jérusalem ! Toi qui fais mourir les prophètes et qui tues à coups de pierres ceux que Dieu t'envoie ! Combien de fois j'ai voulu rassembler tes habitants auprès de moi comme une poule rassemble ses poussins sous ses ailes ! Mais vous ne l'avez pas voulu !

 

L'Eternel Dieu : Esaïe 66.13, Psaume 131

 

Comme un enfant que sa mère console, je vous consolerai. Oui, dans Jérusalem, vous serez consolés.

 

O Eternel, mon cœur ne s'enfle pas d'orgueil, mes yeux n'ont pas visé trop haut, je ne me suis pas engagé dans des projets trop grands, trop élevés pour moi. Bien au contraire : je suis resté tranquille et dans le calme. Je me sentais comme un nourrisson rassasié dans les bras de sa mère, comme un nourrisson apaisé.

Israël, mets ton espérance en l’Éternel, dès maintenant et pour toujours.